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Sergent Jean Lavayssière

25 juin 2014

« INAUGURATION DU MONUMENT DE SIDI BRAHIM A ORAN »

Je tiens à remercier vivement ici, dans ce blog du 8e B.C.P., Jean-Claude LEBON, un camarade du 16e B.C.P pour m’avoir fait parvenir une copie de l’ouvrage du Commandant CAFFIER, ex-capitaine-Major du 8e Bataillon de Chasseurs à pied, ayant pour titre « Au Marabout de Sidi-Brahim et à Calais ». Œuvre sortie pour l’inauguration du monument du Souvenir Français et dédié à la gloire du Capitaine Dutertre, héros de Sidi-Brahim.

Editeur : Jules Tallandier 1904.

De cet ouvrage, j’ouvre le chapitre suivant :

Le 18 décembre 1898 eut lieu, à Oran, sous la présidence de M. Laferrière, gouverneur général de l’Algérie, l’inauguration du monument élevé par souscription publiques à la mémoire des héros de Sidi-Brahim (Ce monument est situé sur la place d’Armes au cercle militaire ; il est composé d’un piédestal de forme cubique, et d’un tronc de pyramide supportant une gloire aux ailes éployées, portant en ses mains une palmes et une couronne de lauriers. Assise au pied de la pyramide, l’Histoire, un drapeau dans la main gauche, écrit en lettres d’or sur la pierre les mots célèbres : « Camarades ! Défendez-vous jusqu’à la mort. » - Les figures allégoriques sont dues au ciseau du sculpteur Dalou ; l’architecture proprementdite a pour auteur H. Formigé ; H. Gress a construit l’infrastructure et la maçonnerie ; et c’est M. Guillaume qui a placé la grille monumentale.- La hauteur de l’œuvre entière est de 16 mètres. La pyramide est en pierre de taille de Cassis et le socle en pierre des carrières avoisinant Bel-Abbés.). < Le petit Fanal >

A deux heures précises commence la vraie fête, celle qui réunit des milliers de personnes. La foule déborde d’enthousiasme, quand le cortège gubernatorial arrive.

Le voile qui recouvrait le monument est enlevé.

La délégation du 2e Hussards, commandant de Carné, est à droite. La délégation du 8e Bataillon de Chasseurs, Capitaine Caffier, est à gauche, au pied même du monument. Les deux délégations encadrent le clairon Rolland, ayant à sa gauche le sergent Rigoulau et à sa droite le sergent Pègues.

Avant de donner la parole au Commandant Mirauchaux, président du comité d’initiative, le gouverneur général descend de la tribune, salue les délégations et serre la main aux survivants, particulièrement au clairon Rolland, puis il remonte au fauteuil présidentiel.

La foule crie : Vive l’Armée ! Vive le Gouverneur ! Avec un ensemble saisissant.

Décidément la fête commence bien !

M. le commandant Mirauchaux, M. Gobert, maire d’Oran, M. de Rochefort, au nom du comité d’organisation des fêtes, prennent successivement la parole pour retracer les événements de Sidi-Brahim et célébrer dans un langage très élevé, très patriotique, les vertus militaires de nos camarades ; mais le fait le plus saillant de cette cérémonie fut certainement le discours de M. le Général de Ganay, commandant la Division d’Oran, qui parla au nom de l’Armée. Sa péroraison, dite d’une voix forte et mâle, impressionna vivement et fut justement applaudie.

« Soldats, mes chers soldats, s’écria–t-il, soldats de tous âges et de tous grades, soldats d’hier, soldats d’aujourd’hui et soldats de demain, imitez vos devanciers de Sidi-Brahim, sachez, quand il le faudra, mourir silencieusement comme eus pour le pays ! Votre part sera belle encore, car la France si souvent victorieuse, sait honorer même ses infortunés vaincus ! »

Enfin le gouverneur Général se lève et prononce le discourt de clôture. Il développe cette pensée : « C’est déjà pratiquer la vertu que de savoir l’honorer dignement », et il termine par un vibrant appel à l’union de tous pour l’avenir de l’Algérie.

L’inauguration officielle du monument est terminée ; les troupes se massent pour défiler sous le commandement du général Mauduit, pendant que la musique du 1er Régiment étranger exécute, avec sa maestria habituelle, le pas redoublé de Sidi-Brahim.

Après l’Armée, les sociétés civiles, bannières en tête, passent aussi devant le monument, et ce n’est pas la partie la moins pittoresque de cette fête patriotique.

A sept heures du soir, à l’Hôtel de la Préfecture, dîner offert par le Préfet et Mme De Malherbe au Gouverneur Général. Le chef de la délégation du 8e y assiste.

Enfin, à dix heures, un punch offert par la municipalité à tous les invités et à tous les officiers de la garnison eut lieu à l’hôtel de la Mairie.

La salle des fêtes est splendide, et la lumière, qui verse à flots ses rayons sur les uniformes militaires et civils, donne à cette réunion un caractère grandiose.

M. le maire d’Oran remercie encore le Gouverneur Général et tous ses invités, puis M. Laferrière fait ses adieux et se retire.

Au dehors, la foule continue de circuler joyeuse.

Le lendemain, 19 décembre 1898, le programme comporte : une fête arabe au village nègre ; un punch offert aux sous officiers par la Municipalité, au café de France, et une représentation théâtrale au cirque des Nouveautés ; à neuf heures du soir : Apothéose des Héros de Sidi-Brahim !

La fête arabe fut originale. Je fus surtout intéressé par les assauts de savate et de matraque ; et par les danses des foulards et des épées. On sentait que les indigènes étaient dans leur élément et tenaient à briller. Aussi la lutte fut-elle parfois vive et poussé jusqu’au sang.

A près les danses plus ou moins lascives eut lieu la fantasia arabe ; mais l’arène m’a paru trop restreinte pour que les cavaliers, si audacieux qu’ils soient, pussent donner toute leur mesure. Il était facile quand même de constater leur vigueur, leur entrain et leur habileté équestre.

Mettez, d’ailleurs, un arabe quelconque sur un cheval, sur un mulet ou même sur un âne, et vous le verrez se métamorphoser immédiatement en guerrier. Il lui faut le cheval pour faire parler la poudre et se montrer sous son vrai jour.

Au punch des sous-officiers, à 4 h et demi, je dus y aller, moi aussi, de mon toast et je dis : « Messieurs, je ne comptais pas prendre la parole dans cette réunion. J’avais seulement prié MM. Les membres du Comité d’organisation de vouloir bien ajouter un dernier toast à tous ceux qui ont été prononcés pendant ces deux journées inoubliable ; mais M. le Président du Comité croit qu’aucun autre n’est mieux qualifié que le chef de la délégation du 8e Bataillon de Chasseurs pour rendre un pieux hommage aux deux sœurs du Commandant Froment-Coste et au peintre militaire, M. Alphonse Chigot, de Valenciennes.

Je ne puis donc me dérober à ce devoir et je viens vous prier, Messieurs, de bien vouloir bien associer aux fêtes de Sidi-Brahim Mesdemoiselles Froment-Coste, qui sont aujourd’hui de véritables octogénaires, habitant la Rochelle.

Elles seront certainement heureuses et fières d’apprendre tout ce qui a été fait ici, sur la terre d’Afrique, et particulièrement à Oran, pour glorifier leur frère.

Messieurs, à la santé de Mesdemoiselles Froment-Coste !

Je désire aussi, avant la fin de cette réunion, rendre un public hommage à M. Alphonse Chigot, dont le fils, administrateur dans cette colonie, est ici le représentant autorisé. M. Alphonse Chigot, ancien chasseur d’Orléans, qui avait combattu à Isly, les 14 aoûts 1844, à côté du 8 e Bataillon de chasseur, avait été impressionné par les événements de Sidi-Brahim, qu’il avait résolu de travailler, afin de pouvoir quelque jour les fixer sur la toile.

Son vœu s’est réalisé, Messieurs, et l’ancien fourrier du 6e Bataillon est devenu un artiste, un peintre de grand cœur et de grand talent, dont nous admirons aujourd’hui les œuvres, dans notre salle d’honneur : Le combat de Sidi-Brahim, l’héroïsme du capitaine Dutertre et l’Evocation.

Je vous demande donc, Messieurs, de lever une dernière fois mon verre en l’honneur de M. Alphonse Chigot, le peintre de Sidi-Brahim !

Je remercie enfin la municipalité d’Oran de son accueil si cordial. Cette fête honore, sans doute, nos aînés, mais nous trace aussi nos devoirs : nous saurons les remplir. »

Alors, tous les sous-officiers mettent sabre au clair et font aux survivants une voûte d’honneur, sous laquelle nous défilons tous pour rentrer chez nous, en attendant la représentation théâtrale.

A 8 heures 45, j’étais de retour à l’hôtel continental pour prendre le clairon Rolland, les deux sergents Pègues et Rigoulau, et les conduire au cirque des nouveautés. On les appelait « Les survivants » mais de survivant réel, ayant pris une part effective à la défense des carrés ou du marabout de Sidi-Brahim, du 23 au 26 septembre 1845, il n’y avait que Rolland.

A notre entré la salle était déjà comble.

Rolland fut l’objet d’une innovation chaleureuse quand il parut à côté de moi, dans la loge réservé aux délégations officielles.

La soirée débuta par l’Ouverture de Charles VI, magnifiquement exécutée par la musique du 2e Zouaves.

L’orchestre à cordes du 1er étranger exécuta aussitôt après une fantaisie sur les Dragons de Villars, qui provoqua des applaudissements unanimes.

Le rideau se leva ensuite pour la représentation du drame héroïque de « Sidi-Brahim » par M. Briet.

Le monologue du Lieutenant-colonel de Montagnac, au moment même où il sent la vie lui échapper, est de toute beauté ; et le portrait du caporal Lavayssière y est tracé de main de maître.

Toute la pièce, qui reflète le plus pur patriotisme, a un relief extraordinaire et mérite d’ailleurs d’être conservée.

Le chant de Sidi-Brahim exécuté ensuite par les deux musiques du 1er étranger et du 2e zouaves fut écouté debout par tous les assistants.

Enfin une ode héroïque : l’Histoire aux Morts, fut dite avec émotion par Mme Bernard, du Théâtre municipal d’Oran, puis l’apothéose des héros de Sidi-Brahim eut lieu aux son de la Marseillaise et des cris enthousiastes, frénétiques, de : « Vive l’armée, Vivent les chasseurs ! Vivent les hussards !

Le tableau représentait la Gloire couvrant le Drapeau tricolore des combattants de Sidi-Brahim, étendus sans mouvement au pied du marabout !

Cette dernière partie du programme fut absolument réussie, et tout le monde se retira impressionné !

(Des médailles commémoratives, grand modèle, en argent, furent frappées à l’occasion de l’inauguration du monument, et M. de Rochefort, président des fêtes, voulut bien m’en remettre une pour le 8e bataillon de Chasseurs à pied ; elle est aujourd’hui déposé à la salle d’honneur.)

 

 

 

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8 juin 2014

Photo du sergent Lavayssière

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8 juin 2014

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8 juin 2014

Les combats de Sidi-Brahim par J. Lavayssière

 

PRÉLIMILAIRES

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 Le 1er novembre 1840, la formation du 8e bataillon de Chasseurs commençait à s'effectuer au camp d'Elfaut, près de Saint-Omer (Pas de Calais).

 Le 10 juin 1841, le Bataillon s'embarquait pour l'Algérie et prenait terre le 14 à Monstagamen, sous les ordres du commandant Uhrich.

 A peine débarqué, le Bataillon prenait part ( juin 1841à janvier 1842) aux expéditions du Chéliff, des Flittass sous le commandement supérieur du général Bugeaud, au combat d'El-Bordj, à la soumission des Bordgias, des Medghers, des Beni-Chougran.

 Le 6 février 1842, le commandant Froment-Coste succédait au commandant Uhrich et pendant les années 1842, 1843, et 1844, conduisait le bataillon dans les opérations de la province d'Oran. Acquis de Nédroma, prise de Keff, combat de la Sikack, combat de Bab-el-Thaza, expéditions des Benis-Snous, des Oulassas, des Benis-Amers, des Ouled-Naars, des Djaffras, des Anglades, combat de Sidi-Azis.

  Le 14 août 1844, le Bataillon prenait une part glorieuse à la bataille de l'Isly, et après de nouvelle expéditions autour de Sebdon et de Lalla-Marghnia, rentrait dans sa garnison de Tlecen. (Janvier 1845).

Il en repartait le 1er avril et pendant trois mois opérait autour de Sebdon, chez ls Ouled-Mimoun, et dans le sud à la poursuite d'Abd el Kader.

 Enfin le 5 août 1845, le Bataillon se mettait en route pour Djemmâa-Ghazaouat. (aujourd'hui Nemours), pour y tenir garnison avec deux escadrons du 2e Hussards.

  Jusqu'au 20 septembre, le Bataillon est employé aux travaux de fortification de la place et fait de nombreuses sorties pour calmer l'agitation causée dans les tribus environnantes pour la défection de l'Agha, des Ghossels et l'approche d'Abd el Kader.

 Le 21 septembre, le colonel de Montagnac, du 15e Léger, commandant supérieur de Djemmâa, se décide à sortir avec la majeur partie de la garnison, soixante hussards sous les ordres du chef d'escadron Courby de Cognord, et cinq compagnies du 8e Bataillon, fortes de 346 hommes, sous la conduite du chef de bataillon Froment-Coste. C''étaient les 2e, 3e, 6e, 7e,et une compagnie de carabiniers, la 8e, encadrées de la manière suivante :

 Commandant FROMENT-COSTE.

Capitaine adjudant-Major DUTERTRE

Médecin aide-major ROSAGUTI

 2e compagnie : Capitaine BURGARD

 3e compagnie : Sous Lieutenant LARRAZET

 6e Compagnie : Capitaine DE CHARGÈRE

 7e compagnie : Lieutenant De RAYMOND

 8e compagnie : (Carabiniers) Capitaine de GÈRAUX

 Lieutenant CHAPPEDELAINE

 

 La première compagnie avait été laissé à Tlemcen

 Les 4e et 5e compagnies constituaient le dépôt, stationné en France (Toulouse)

 

 Combat de – SIDI-BRAHIM -

(23, 24, 25, 26 Septembre 1845)

  La colonne sortit de Djemmâa le 21 septembre à dix heures du soir, emportant des vivres pour six jours;elle marcha jusqu'à deux heures du matin, à l'ouest, dans la direction de l'Oued-Taouli. La nuit se passa au bord de cette petite rivière, les hommes couchés au pied de leurs faisceaux.

 Le 22 septembre, au jour, le colonel de Montagnac fit établir le camp, on déjeuna , et, à onze heure, on se remit en marche, mais cette fois en appuyant au sud-est. La colonne ne fit que deux lieues et campa sur l'Oued Tarnana ; déjà des cavaliers paraissaient sur les crêtes voisines ; une reconnaissance fut reçue à coups de fusils ; les avants-postes furent inquiétés dès deux heures de l'après-midi. On était en présence de l'ennemi ; l'influence seule de l'émir Abd el Kader pouvait donner cette assurance inaccoutumée. Le colonel de Montagnac instruisit de ces faits le Capitaine du génie, commandant supérieur de Djemmâa par intérim, et le prévint qu'il ne pouvait rentrer sans exposer les Souhalias à être enlevés.

 Au jour, le 23 septembre, on s’aperçut que les postes arabes s'étaient rapprochés à la faveur de la nuit, et les crêtes, à environ mille mètres du camp se couvraient de cavaliers dont le nombre, à sept heures du matin, fut estimé à six ou sept cents. A neuf heures, le colonel laissa le commandement du camp au commandant Froment-Coste, du 8e Bataillon, et se mit en marche avec le chef d'escadrons Courby de Cognord et ses soixante cavaliers du 2e Hussards, suivis des 3e, 6e, 7e, compagnies et de 3 escouades de carabiniers, sous les ordres du sergent Bernard ; l'infanterie était sans sacs ; la cavalerie marchait en tête, au pas ; le Colonel la conduisait lui-même.

 Il ne restait pour garder le camp que la 2e compagnie de carabiniers du capitaine de Géreaux, diminués de trois escouades.

 La petite colonne s’avança jusqu'à 400 mètres de l'ennemi et éprouva une première résistance. La troupe se reforma ; puis laissant l'infanterie en place , le colonel s'élança à la tête de la cavalerie et se rua sur les groupes ennemis. La plus grande partie des Hussards périrent dans cette première charge. La retraite se fit sur les Chasseurs qui arrivaient déjà au pas de course ; on reprit l'offensive et les trois compagnies marchèrent résolument à l'ennemi.

 Un ravin se présentait qu'il fallait franchir ; à peine les Chasseurs y étaient-ils engagés que des avalanches de cavaliers et de kabyles s'y précipitaient de toutes parts. On était loin de s'attendre à un ennemi aussi nombreux : les espions avaient trompé la foi du Colonel, qui n'avait pu voir qu'une très petite partie des arabes, habilement cachés dans les plis d'un terrain excessivement accidenté. Cependant on parvint à prendre position.

 Le carré fut formé dans le plus grand ordre, et alors commença une horrible scène de destruction. Le colonel de Montagnac tomba dans les premiers, et ceux qui, quelques mois plus tard, furent appelés à recueillir les précieux restes de ces héroïques victimes du devoir et de la discipline, ont pu voir sur le terrain que les ossements jonchaient en carré, comment chacun mourut à sa place, et dire combien était vrai la poétique expression des merveilleux échappés de ce massacre :  «  sans cartouches, ne pouvant plus riposter, ils ont attendu la mort et sont tombés comme un vieux mur que l'on bat en brèche. »

  Mais déjà le second et non moins douloureux épisode se préparait.

 Le maréchal des logis Barbut était en effet arrivé ventre à terre, demander du secours de la part du Colonel mourant , il annonçait que tout était perdu, que l’Émir commandait en personne des forces considérables, et qu'il n'y avait plus de retraite possible.

 Le commandant Froment-Coste prend alors une soixantaine de Chasseurs (2e compagnie) et s'élance à l'ennemi, laissant à son tour à la garde du camp le Capitaine de Géreaux et ses carabiniers. Il était arrivé à un quart de lieue du camp de carnage quand tout à coup la cessation de la fusillade et l'arrivée bruyante de milliers d'arabes lui apprirent que tout était fini avec le Colonel de Montagnac.

 En toute hâte, il gagne sur sa gauche un point plus convenable pour la défense, et y forme en carré sa petite troupe, qui désormais ne doit plus compter que sur elle-même . Bientôt il est enfermé dans un cercle d'ennemis qu''enivre un premier succès. A la vue , un jeune Chasseur s'écrie tout émue :  «  Nous sommes perdues, nous sommes morts ! » Quel âge as-tu ? Lui dit le commandant – Vingt deux-ans, – Eh bien ! J'ai souffert dix-huit de plus que toi ; c'est ici que nous devons mourir, je vais te montrer à tomber le cœur ferme et la tête haute. «  Le digne chef du 8e tomba aussitôt frappé à la tête ; bientôt après lui tombaient le capitaine-adjudant major Dutertre, qui avait pris le commandement et le capitaine Burgard ; l'Adjudant Thomas est enlevé en exhortant ceux qui restaient debout à mourir en braves sur les corps de leurs officiers. Sur cet emplacement si tristement célèbre , il ne reste plus que douze hommes criblés de blessures.

 Mais sur ces entrefaites, un autre hussard était enlevé au camp, annonçant que le Commandant et soixante braves étaient massacrés ou prisonniers.

 Le capitaine de Géreaux aidé par le lieutenant Chappedelaine rallie la garde du troupeau (une escouade de la 3e) les muletiers du Bataillon, la grand garde commandée par le caporal Lavayssière deux escouade de la 3e et ses Carabiniers, en tout un peu plus de quatre-vingts hommes s 'élance au secours des derniers survivants. A peine la petite troupe avait-elle parcouru deux cents mètres qu'elle était entourée d'une nuée d'ennemis. Toute retraite était coupée

 Le capitaine se décide alors à gagner une petite construction en pierre, situé à 800 mètres , résolu à s'y défendre jusqu'à la dernière extrémité. Il ordonne de charger à la baïonnette : mais ce n'est qu'après trois heures d'un combat acharné que nos Chasseurs arrivent à prendre position dans cette petite construction (Marabout de Sidi-Brahim) gardé par une trentaine d'arabes. Ils l'emportent d'assaut sur les quatre faces à la fois : mais cette modeste victoire avait coûté la vie à cinq hommes, parmi lesquels le sergent Estayères, vieux brave comptant 28 années d'excellents services.

Le capitaine de Géreaux avait eu la cuisse traversée par une balle ; le lieutenant Chappedelaine avait reçu un coup de feu au côté droit. On organisa rapidement la défense : le mur d'enceinte, qui n'a qu'un mètre de hauteur, est garni de créneaux, l'entrée est fermée à l'aide des cantines ; chaque face reçoit une vingtaine de défenseur.

 Alors commence cette lutte épique qui devait illustrer à jamais, avec le numéro du 8e Bataillon, l'arme entière des Chasseurs à pied, et où se couvrit de gloire le caporal Lavayssière, l'âme et la tête de la résistance, dans ce combat digne des héros d'Homère.

 Le capitaine de Géreaux, dans l'espoir d'attirer l'attention de la colonne Barral que l'on sait rayonner dans les environs, ordonne à Lavayssière de désigner un chasseur pour aller planter un drapeau au faite du marabout : «  Mon capitaine, répond le brave caporal, je préfère y monter moi-même, car ce serait envoyer un Chasseur à une mort certaine.-Je promets une belle récompense à celui qui aura le courage d'aller planter le drapeau, ajoute aussitôt le Capitaine.

 Lavayssière prend la ceinture rouge du lieutenant de Chappedelaine, et la noue à sa cravate bleue et un mouchoir blanc, coupe une branche de figuier et, sous une grêle de balles, gravit le dôme du marabout. Les balles sifflaient de tous côtés ; l'une enleva le képi du Caporal sans le blesser, une autre l'atteint à l'épaule gauche, une troisième coupe entre ses mains la hampe de son drapeau improvisé, au moment même où il le plantait.

 Lavayssière parvient à consolider son signal , et se fait lancer la lunette du Capitaine.Il aperçoit la colonne Barral ; mais il voit qu'elle est attaquer et qu'elle se retire. Tout espoir de salut était était donc perdu pour nos braves Chasseurs Carabiniers.

 Cependant les arabes continuaient leur fusillade et leurs assauts furieux contre le marabout. Une première sommation est portée par un arabe qui s'annonce par une sonnerie. Elle est écrite en français ; le Capitaine répond qu'il préfère mourir cent fois plutôt que de se rendre.

 Une deuxième sommation parvient au Capitaine, après une reprise de combat ; elle est rédigée en arabe. L'interprète Levy en donne l'explication. Elle contient la menace que, si la petite troupe ne se rend pas, les hommes auront la tête tranchée.

 Le Capitaine fait répondre que ses Chasseurs et lui sont sous la garde de Dieu, et qu'ils attendent l'ennemi de pied ferme.

 La troisième et dernière sommation est plus pressante que les deux premières, mais ne renferme aucune menace. Lavayssière la reçoit et s'empresse de la communiquer à son chef, qui était allé se reposer dans le marabout à côté de son lieutenant, l'un et l'autre souffrant horriblement de leurs blessures Le docteur Rosaguti ne pouvait les soigner comme il l'aurai voulu, car son matériel était resté au camp.

 Le Capitaine ne veut faire aucune réponse. Le Caporal lui demande son crayon, et écrit au bas de cette sommation : « M.... pour Abd el Kader ! Les chasseurs d'Orléans se font tuer, mais ne se rendent jamais ! » Il tend la lettre à son Capitaine, qui trouve encore la force de sourire et de lui dire : «  Tu as raison, Caporal fais-leur tenir cette réponse. »

 C'est ainsi qu'il a été donné aux héros dont s’enorgueillit le 8e de réaliser le mot de Waterloo. 

Abd el Kader envoie devant le marabout une dizaine de prisonniers, les mains liées, et entourés d'une escorte. Il espérait que cette vue démoraliserait la défense et amènerait une capitulation. Lavayssière, qui comptait parmi ces prisonniers quelques compatriotes du midi, leur crie dans son patois : « Couchez-vous. » Ceux-ci s'entendent aussitôt et au commandement du Caporal, une fusillade terrible commence sur l'escorte , et même sur l'entourage de l’Émir, qui placé à quelques centaines de mètres, attendait l'effet de sa démonstration. Abd el Kader est même atteint à l'oreille.

 Nota : «  Jean Lavayssière ne fait pas part de l'épisode entre le Capitaine-Adjudant-Major Dutertre à ses camarades de continuer le combat, plutôt que de se rendre »

 Un nouvel assaut plus terrible, plus furieux, commence alors, les arabes qui reçoivent des feux de salve à bonne portée, finissent par reculer. A cinq heures du soir, reprise exaspérée du combat ; nom plus, cette fois, seulement à coups de fusil, mais à coup de pierres que les chasseurs renvoient en partie(On en retira plus tard quatre prolonges de l'enceinte du marabout.)

 La lutte dure ainsi pendant trois quarts d'heure. Deux hommes sont blessés. La nuit vient mettre fin au combat et se passe assez tranquillement.

 Le jour vient (24 septembre). Ce n'est qu'à dix heures du matin que les arabes tentent un nouvel assaut, plus terrible encore que les précédents. Aucun d'eux ne peut franchir la muraille.

La journée s'achève sans incidents, la nuit vient, et le 25 à 8 heures, une nouvelle attaque se produit. Des milliers d'arabes et de kabyles se lancent sur le marabout. Après une première décharge, vient la lutte à coups de pierres,à coups de sabre, corps à corps.

 Nos Chasseurs font un tel carnage que les arabes cèdent le terrain et n'osent venir prendre leurs morts qu'à la faveur de l'obscurité, la nuit suivante.

 L’Émir avait renoncé à prendre le marabout d'assaut, et commençait le blocus.

 Les braves défenseurs de cette petite forteresse étaient exténués.Ils souffraient de la soif, plus encore que de la faim, à la suite de ces trois journées de lutte, sans repos, sans vivres, sans eau, sous les ardeurs implacable du soleil d'Afrique. Nos Chasseurs en sont réduits à boire leur urine mélangée à un peu d'absinthe.

 Ils demandent tous à tenter une sortie pour atteindre, au dépens même de leur vie, une fontaine située à cinquante mètres du marabout

 Le Capitaine de Géreaux se résout à essayer de percer l'ennemi pour regagner Djemmâa-Ghazaouat.

Lavayssière pendant la nuit, va reprendre son petit drapeau, qu'il retrouve criblé de balles.

 Le 26 au matin, les défenseurs du marabout n'espéraient plus de secours ; le manque de sommeil, les tortures de la faim et de la soif commençaient à les abattre de telle façon que, s'ils tardaient encore à prendre une décision, ils risquaient d'être incapable de marcher ; une pareille situation ne pouvait se prolonger davantage.

 Le capitaine tint conseil , et prit la résolution de sortir le jour même ; mieux valait, disait-il, mourir en combattant que de tomber d'inanition dans ce réduit. Par un heureux hasard , les Kabyles, qui étaient venus renforcer les postes pendant la nuit dans l'espoir d'accabler les Français, se retirèrent, ne laissant autour du marabout que le contingent habituel. L'instant était propice, il fallait en profiter. Toutes les dispositions furent prises pour le départ : les hommes avait coupé leurs balles en plusieurs morceaux afin d'avoir plus longtemps des munitions ; vingt carabiniers furent désignés pour partir en avant, vingt en arrière et une quinzaine sur chaque face.

 Vers six heures du soir, Géreaux donne le signal du départ ; aussitôt les murs sont franchis, et les carabiniers se précipitent dans la direction de quelques ruines qui étaient les restes de vielles maisons kabyles ; c'est là que se trouvait le poste le plus rapproché, Les Kabyles qui gardaient le poste, au nombre d'une quarantaine, étaient occupés à manger le couscous ; surpris à l’improviste, ils se défendent à coups de fusils, mais ils ne parviennent à blesser qu'un Français, tandis qu'un grand nombre d'entre eux son passés à la baïonnette ; les autres prenant la fuite dans toutes les directions.

 Formée en carré, et entourant le Capitaine et le Lieutenant épuisés, soutenus par les carabiniers. Nos braves marchent dans cet ordre, toujours luttant, serrant les rangs chaque fois qu'un camarade tombe pour ne plus se relever. La petite colonne fait ainsi deux lieues ; le Capitaine ne peut plus se soutenir. Lavayssière ordonne une halte de dix minutes. Pendant ce court repos, trois carabiniers sont tués.

 Le carré se reforme et reprend sa marche vers Djemmâa, toujours harcelé par des nuées de cavaliers ennemis, qui s'opposent à la retraite. Deux lieues se font encore : nouvelle halte, afin de permettre aux officiers exténués, et à tous les blessés, réunis au centre, de se reposer un peu.

 Nos chasseurs ne sont plus qu'à deux kilomètres de Djemmâa. Le capitaine tombe frappé d'une balle à la tête . Deux Chasseurs s'emparent de son corps, et la retraite s’accélère, terrible pour les arabes. Mais l'ennemi devient plus nombreux, plus acharné que jamais, et bientôt les braves Carabiniers sont obligés de donner un dernier regard et de dire un dernier adieu aux restes de leur malheureux Capitaine.

 Le Lieutenant Chappedelaine, atteint de deux balles en pleine poitrine, et le docteur Rosaguti, succombaient à leur tour.

 La petite troupe s'engage dans un défilé, mais l'ennemi la distançant, lui coupe de nouveau la retraite.  «  Mes amis, s'écrie Lavayssière, il n'y a plus de carré possible ! En avant ! Et à la baïonnette ! » Suivant l'expression de Lavayssière lui même, ce combat était « de la folie, de la rage, un massacre, une boucherie indescriptible » Enfin le passage est forcé, et cinq hommes se retrouvent debout autour de l'héroïque Caporal, tous désarmés. Seul Lavayssière avait conservé sa carabine.

  Ils arrivent à 200 mètres de la redoute . Nouvelle charge de trois cavaliers qui restent sur le carreau. Un kabyle, dissimulé derrière un arbre, blesse le hussard Nataly, Lavayssière lui enfonce sa baïonnette dans le ventre. Enfin, à 50 mètres seulement de la redoute, un juif, vers lequel Lavayssière s'avançait sans méfiance, le blesse d'un coup de pistolet à l'oreille gauche. Il a le sort du kabyle.

 Quelques Chasseurs échappés du massacre rejoignent le petit groupe. Ils arrivent neuf aux portes de Djemmâa. La garnison fit une sortie et rapporta les corps des six malheureux blessés.

 Le 8e bataillon de Chasseurs se trouvait réduit à quinze survivants.

Le Caporal Lavayssière, le Caporal conducteur Jean-Pierre, Charles Langlais, Joseph Rimond Chasseur, Joseph Siguier Clairon ; Elie Delfieu, Etienne Laparra, Daniel fers, Maurice Langevin, Bazille Médaille, Claude Antoine, Jean-Florentin Tressy, Gabriel Léger, Victor Michel, Louis Lepic Audebert , carabiniers.

 Jean-Pierre et Audebert moururent épuisés à l'hôpital D'Oran, Fert, Médaille et le clairon Siguier succombèrent peu de jours après dans le même hôpital.

 En résumé, 8 officiers et 252 sous-officiers et Chasseurs sont morts dans ces mémorables journées ; 80 avaient été faits prisonniers, la plupart couverts de blessures : parmi eux, le sous-lieutenant Larrazet et l'adjudant Thomas. Mais, chose remarquable, et qui fera l'orgueil éternel du 8e Bataillon, pas une plainte, pas un murmure, pas une parole de défiance, aucune hésitation, pas l'ombre d'un désordre dans ces épreuves si prolongées, si diverses, tant étaient fortes la discipline et l'aveugle confiance dans les chefs qui ont si bien montré combien ils étaient dignes. Pas un instant le dévouement n'a failli, et c'est le plus bel éloge qui puisse être fait de ces glorieux martyrs de l'honneur et du devoir.

 Djemmâa fut bloqué pendant quinze jours, et fut délivré le 10 octobre par les colonnes Lamoricière et Cavaignac.

 La première pensée des généraux fut pour les Carabiniers morts et restés sans sépultures dans le ravin des Ouled-Ziris. Quelques-uns, MM. De Géreaux et Chappedelaine entre autres, purent être reconnus. Le lieutenant-Général voulut lui-même présider la triste cérémonie, et, dans une allocution pleine d'éloges et d'expressions d'un vif regret, demanda vengeance au non de la France et de l'armée pour ces braves qui venaient de porter si haut le nom français. L'ordre du jour mentionna les noms des quinze militaires qui avaient survécu à la retraite de Sidi-Brahim : le caporal Lavayssière dont l'énergie morale avait été si remarquable, et qui avait puisé dans cette énergie les forces nécessaires pour rapporter seul son arme, fut nommé sergent : les Chasseurs et Carabiniers qui l'accompagnaient furent nommés caporaux.

 Le sergent Lavayssière fut décoré de la Légion d'Honneur ainsi que tous les autres survivants.

 Un hommage posthume fut rendu aux victimes dont les corps avaient été retrouvés : des croix de la Légion d'Honneur furent attachées sur les cercueils qui renfermaient leurs restes glorieux.

 Le 12 mai 1846, au milieu d'un immense carré formé de dix bataillons de Chasseurs et huit escadrons de Hussards, le Général commandant la subdivision de Tlemcen, après une allocution énergique et émue, remettait au non de S.A.R. Le comte de Paris, une carabine d'Honneur au sergent Lavayssière. L'arme porte l'inscription : Donné par le Prince Royal au caporal Lavayssière.- Sidi-Brahim.- Septembre 1845.

 Du 24 septembre au 13 octobre de l'année 1846, le 8e Bataillon, pendant son séjour au camp de Djemmâa accomplissait un pieux pèlerinage aux lieux témoins des derniers moments de la retraite héroïque des défenseurs de Sidi-Brahim.

 Tel fut le combat de Sidi-Brahim....

L'impressiondramatique qui se dégage de ce simple récit et que tout commentaire affaiblirait, fera coùmprendre quels précieux souvenirs évoque la pensée de ces trois journées, qu'on peut appeler les trois glorieuses des chasseurs à pied.

 Cette narration dira aussi pourquoi l'anniversaire de ce combat héroïque a été choisi pour la célébration de la fête des trente Bataillons de l'arme, et exposera enfin les titres du sergent Lavaissière, du modeste héros qui personnifie encore aujourd'hui ces souvenirs impérissables, à la sympathie enthousiaste de tous les Chassurs de l'armée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

8 juin 2014

Le sergent Lavayssière héros Le Sidi-Brahim

 

Qui était Jean Lavayssière

 

Dans la cassette en acajou contenant la carabine d'honneur (*) offert par le prince royal, après le combat de Sidi-Brahim, il y avait 1.000 francs en pièces de 5 francs dans 10 petites cases.

 Après l'avoir félicité , le général Cavaignac déclara devant le front des troupes :  « Sergent Lavayssière, au non du Roi et du Prince Royal, en récompense de votre belle conduite dans la retraite du Marabout de Sidi-Brahim, dont vous êtes le héros, je vous fais la remise d'une carabine d'honneur en échange de celle qui a été sauvé par vous. Sergent Lavayssière, vous avez bien mérité de la Patrie !. »

 La duchesse d'Orléans réclama le fanion tricolore devenu une loque et la carabine d'ordonance rapportée par le héros. Elle fit placer le fanion et la carabine dans la chambre du duc d'Orléans aux Tuilleries.

 

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 A la révolution de fèvrier 1848, la chambre fut respectée . La carabine resta en possession de la famille d'Orléans mais le fanion de Sidi-Brahim avait disparu.

 Lavayssière assista à toutes les cérémonies militaires en l'honneur des combattants de Sidi-Brahim.

 A sa libération, le 31 décembre 1848, Lavayssière est libéré au bout de 6 années de loyaux services au 8e bataillon de Chasseurs. Il rentre en France, à Marseille, puis à Castelfranc. Le 23 mai 1849 il épouse Rose Pages. De ce mariage il eut trois filles : la première Maria, née à Castelfranc le 23 mars 1850, qui avait épousé Faideau, forgeron à Poitiers et mourut le 17 avril 1878, ayant eu un fils mort en cochinchine, et une fille Celina, femme de M. Delfour, cultivateur à Castelfranc. La seconde fille Sara, née à Capdenac (Aveyron) , le 27 juillet 1852, épousa le 25 avril 1876 Auguste Lafon, ex-sergent qui avait fait la campagne de 1870-1871 et mourut le 30 novembre 1911. La veuve Sara Lafon , née Lavayssière, habitait Castelfranc, gardienne fidéle de la carabine du héros ; elle eût un fils, Raymond Lafon, né à Castelfranc le 22 décembre 1885, qui fut sergent au 8e bataillon de chasseurs à pied à Amiens.

Lavaissière eut enfin une troisième fille, Célina, née à Capdenac le 24 mai 1855, qui avait épousé M. Attendu à Castelfranc, et mourut le 8 septembre 1879.

 Jean Lavayssière est signalé comme un opposant aux idées républicaines ; il est soupçonné d'être attaché aux traditions royalistes. Le Gouvernement impérial en 1852 vint en aide à ce héros et lui offre une place d'éclusier sur le canal du Lot, à Arelles (Aveyron) et à Douelle en 1856 (Lot) et ceci durant une période de quatorze ans.

 Notre héros à du mal à se réadapter à la vie civile, il est nerveux, violent, d'un caractère difficile ; au cours d'une discussion avec un de ces chefs qui lui faisait une observation, Lavayssière le saisit et le jeta dans le canal. Lavayssière est suspendu de ses fonction en 1863.

 Il n'a plus de ressource, sauf ces 250 de sa Légion d'Honneur. Il retourne à Castelfranc et pour élever ses trois filles il devient viticulteur. La vente de son vin lui procure 1.500 francs par an. Dans le même temps, il est engagé comme garde suise dans l'égise de Castelfranc.

 De 1876 à 1880, Lavayssière connait la misère, le manque d'argent, le phylloxéra à ravagé ses vignes. Il perd son père en 1879. En 1882 , il perd son épouse.

 Jean est seul, désemparé, anéanti ; il est menacé de cécité. Le 13 juin 1883 au soir, sous la flamme tremblante d'une bougie, il prend sa plume, et écrit au Chancelier de la Légion d'Honneur, le général Fèvrier. Il rappelle qu'il a planté le drapeau français sur le Marabout de Sidi-Brahim, il dit aussi qu'il vient de perdre un œil ; et qu'il n'a que que 250 francs pour vivre. Il demande également son admissionà l'hôpital des Quinze-Vingt à Paris afin d 'être soigné. Cinq jours après le général Fèvrier lui faisait parvenir son admission gratuite aux Quinze-Vingt et la somme de 80 francs pour son voyage. Par les journaux qui signalent son arrivée, les chefs de bataillons de chasseurs à pied sont prévenus. Tous organisnt pour lui plusieurs banquets . Il est invité souvent en 1883 dans son bataillon au 8e chasseurs à pied.

 Partout il est fêter, il est reçu dans la nouvelle garnison du 8e bataillon, à la citadelle d'Amiens. Le bataillon entier lui présente les armes au son de la marche de Sidi-Brahim.

 A son départ, tous les chasseurs lui crient «  Vive Lavayssière »

 Il réintègra ensuite le Quinze-Vingt le 8 février 1883 où il subira avec succès une opération pratiquer par le docteur Fieuzal qui lui assurera la conservation de son œil.

 A sa sortie la solidarité chasseurs fonctionne, les 30 bataillons de chasseurs ouvraient une souscription en faveur du héros. Avec le capital reçu il fut constitué une rente viagère à Lavayssière. Notre héros était tiré de la misère.

 Lavayssière regania Castelfranc où il vécut auprès de sa fille et de son gendre. Il passait pour être un homme bon et généreux, tenace et têtu.

 Il mourut le 4 juillet 1892 à Castelfranc . Dans son délire il luttait contre les ennemis qui voulaient lui arracher des mains le drapeau qu'il avait planté sur le Marabout de Sidi-Brahim.

 Il fut enterré dans le petit cimetière de Castelfranc. A la fin de l'année 1892, un percepteur du Lot, ancien chasseur, essaya d'organiser un comité en vue d'élever un monument à Lavayssière. Un député éleva le ton, disant que Lavayssière ne méritait pas que l'on fasse quelque chose. Le comité fut dissous ; pendant 18 ans la tombe du héros Lavayssière.

 Le 31 octobre 1909 au banquet parisien de la Sidi-Brahim organisé par l'Union des Sociétés de chasseurs à pied, le commandant Caffier du 8e Bataillon, signal que la tombe de Lavayssière est en état d'abandon.

 Aussitôt un comité d'initiative est créé, il comprend le général Brun, minitre de la guerre (1909-1911). M. Albert Sarrault, député, sous-secrétaire d'Etat, 50 bataillons de chasseurs à pied et alpins souscrivent, 44 sociétés d'anciens chasseurs, 70 anciens chefs de bataillons, 65 officiers de l'active et de réserves, les musiciens et la chorale du 7e régiment de Ligne de Cahors. Souscrivent également les amicales : Les originaires du Lot à Paris, ceux de Bordeaux et les cadets du Quercy.

 Il est décidé d'élever un monument de 5 mètres de hauteur au héros, le sergent Lavayssière.

 C'est M.Rouge, architecte et statuaire de Cahors qui réalisera ce monument.

 De son côté, dans sa séance du 13 mars 1911, la commission départementale avait renvoyé au Conseil général, accompagné d'un avis très favorable, la demande de subvention présentée par la Commune de Castelfranc en vue de l'aider dans la dépense sésultant des fêtes données à l'occasion de l'inauguration du monument élevé à la mémoire du sergent Jean Lavayssière.

Le Conseil municipal de Castelfranc a voté à cet effet un emprunt de 800 francs et sollicite de l'Assemblée départementale une subvention aussi élevé que possible pour pourvoir à la dépense des fêtes données à l'occasion de l'inauguration du monument.

Je prie le Conseil général de vouloir bien statuer.

 Le 7 mai 1911, à Castelfranc, le monument est inauguré. Les restes de Lavayssière est transféré du petit cimetière et placé sous le monument ; au sommet de celui-ci figure le buste du héros. Un bas-relief représente le vaillant soldat luttant contre les Ouled-Ziri.

 Anatole de Monzie (Député de Cahors)termine son discours d'inauguration en disant :  «  Il ne manque qu'au bon soldat qu'une épittaphe véridique, je la voudrais ainsi conçue : '' Ici repose Jean Lavayssière qui n'eût pas les vertus d'un éclusier ni d'un suisse, mais qui fut un héros'' »

 (*) Cette carabine avait été envoyée au 8e bataillon de chasseurs et à l'Exposition universelle de 1900, où elle a figuré dans les souvenirs rétrospectifs de l'Armée. En 1911, cette carabine était gardée par sa seconde fille, Sara. Aujourd'hui,cette carabine est actuellement au Musée de l'Empéri, à Salon-de-Provence (inauguré le ? ). Ce Musée à crée pour mettre en valeur l'exceptionnelle collection de souvenir historiques et militaires de Raoul et Jean Brunon. Dans une vitrine, trois événements des années 1843 à 1845 retiennent l'intérêt de la vitrine suivante : la prise de la smalah d'Abd el-Kader, la bataille de l'Isly et le combat de Sidi-Brahim. La pièce la plus intéressante est la carabine d'honneur offerte par le duc d'Orléans au caporal Lavayssière, du 8e bataillon de chasseurs d'Orléans, seul survivant du combat de Sidi-Brahim qui soit revenu avec son arme

 Procès verbal de l'exhumation des restes du sergent Lavayssière (copie numérisée)

Le 5 mai 1911, à 2 h. et demi, en présence des membres de la famille, de M. Pailhas maire de la commune de Castelfranc (Lot), du Capitaine Wapler du 19e Bataillon de chasseurs, président du comité du monument, du lieutenant Soury du 13e bataillon de chasseurs, du lieutenant de Juncarot du 7e d'Infanterie, ancien lieutenant du 21e bataillon de chasseurs, de M. Rougé statuaire et de nombreux habitants de la localité, la dépouille mortelle du sergent Lavayssière a été exhumée du cimetière de Castelfranc.

Les restes glorieux du héros de Sidi-Brahim, placés dans un drapeau tricolore, ont été enfermés dans un cercueil de dimensions réduites et placés sous le monument élevé sur la place publique (arrêté préfectoral du 5 mai 1911.)

Sur l'autorisation de la famille et de Madame Lafon, fille de Lavayssière, quelques ossements ont été remis au Capitaine Wapler du 19e Bataillon, pour être distribués à quelques bataillons de chasseurs et à quelques personnes qualifiés pour en recevoir. Ces restes sont au nombre de dix-huit, plus quelques débris infimes, pour que plus tard aucun doute ne puisse exister, ces restes ont été classés et étiquetés par le médecin major Randon du 7e d'Infanterie et la liste des détenteurs a été dressés ci-dessous.

                                                                                                                  Fait à Cahors , le 5 mai 1911.

                                                                                                                  Signé : Wapler, Soury, de de Juncarot

 Je soussigné Wapler Edouard, chef du bataillon territorial, Chevalier de la Légion d'Honneur, certifie que l'extrémité de la clavicule gauche désignée au procès-verbal et portant le n° 5, a été remise par mes soins, le 28 juillet 1912, au Commandant Richard, commandant le 25e bataillon de chasseurs à pied, à Saint-Mihel.

                                                                                                                  Divonne-les-Bains, le 28 juillet 1912

                                                                                                                  E, Wapler

 

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6 mars 2014

vie militaire

- Lavayssière Jean,

 

- Jean est né le 23 novembre 1821, à Castelfranc, (Lot)

- Incorporé au 8e bataillon de chasseurs, le 16 novembre 1842.

- Caporal à la 3e compagnie, le 12 janvier 1845.

- Sergent de carabiniers, le 10 octobre 1845

- Décoration :

- Chevalier de la Légion d'honneur, le 11 octobre 1845.

- Rentre dans son foyer le 31 décembre 1848.

- Décédé le 4 juillet 1892, à Castelfranc (Lot)

- Après sa libération, Lavayssière accepta et exerça pendant quatorze ans, le modeste emploi d'éclusier sur le canal du Lot,

à Puy-Laborde et à Douelle (Aveyron). Presque aveugle dans sa  veillesse, Jean Lavayssière fut admis le 8 juillet 1883 à l'hospice national des quinze-Vingt, où il subit  avec succès une opération que pratique le docteur Fieuzal.

 

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Sergent Jean Lavayssière
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